mardi 27 février 2007

Citation française

Je vais ou je m'ignore.

- Jean Caryol

lundi 26 février 2007

Le ghetto québécois

Avec Martin, Jean-Marc, Alexandre, Kevin et Nicolas, le bloc F était devenu un lieu ou la culture québécoise s'était faite dominante. Les québécois n'étaient pas majoritaires dans le bloc, du moins pas en nombre, mais ils étaient solidaires. Dans ce bâtiment où les résidents se caractérisaient pas leur timidité, la chaleur québécoise faisait contraste.

A tous les soirs, les cuisines du troisième étage devenaient le lieu d'une réunion conviviale. On y préparait des "spagat", des hots dogs (selon la recette de hots dogs en résidence française) et des burgers, entre autres. Alexandre et Kevin débouchaient les bouteilles de vin, et les québécois mangeaient, buvaient et parlaient pendant des heures. Les soirées ne se terminaient qu'à vingt-trois heures, quand la sécurité venait fermer la cuisine pour la nuit.

Entre les journées à l'universite française et les soirées au bloc F, Nicolas avait trouvé un confortable équilibre. Son ignorance le plongeait dans un présent qu'il appréciait.

jeudi 22 février 2007

Sainte-Foy

Deux nouveaux québécois arrivèrent à Lyon. Ils étaient des étudiants en échange, en provenance du cégep de Sainte-Foy. Des vrais petits gars de Sainte-Foy, fêtards alcolo sans honte, deux cégepiens pour qui on devrait écrire Sainte-Foie.

Ils étaient arrivés à Lyon totalement sur le décalage horaire, avide de goûter ce que la France avait de mieux à offrir. Ils découvrirent le Vin.

Pour eux, le Vin français était un cadeau du Ciel. Ils débusquèrent des bouteilles à 12% qui ne coutaient pas deux euros. Du blanc, du rouge, du rosé. La première fois qu'ils virent les interminables rangées de bouteilles alignées, ils tombèrent à genou, remerciant le Divin d'autant de générosité.

Alexandre et Kevin étaient des buveurs pratiquants. Ils ne faisaient pas que croire à l'Effet sacré de l'Alcool, ils le redécouvraient à chaque soir. En ce pays où on trouvait du Vin moins cher que de l'essence, ils entendaient le Seigneur leur souffler sa Sainte Parole. "Allez et buvez en tous. Ceci est mon Vin, versé pour vous."

Nicolas rencontra les deux fanatiques le soir où il rentra de Montpellier. Les trois québécois mangèrent ensemble un repas bien arrosé.

- Alors Nicolas, c'est comment la France?

Nicolas expliqua sommairement comment on vivait en France. Il leur parla des conventions françaises, du mode de vie, des habitudes à prendre. C'était la réponse d'un Nicolas qui n'avait pas de savoir. Une réponse sans conséquence, sans prédictions. C'était une réponse insuffisante. Mais pour les deux garçons de Sainte-Foy, c'était une très bonne réponse. Ils étaient trop enfoncés dans leurs rites religieux pour percevoir la subtile ignorance qui définissait Nicolas.

mardi 20 février 2007

Citation française

Savoir. Forme d'ignorance qui distingue les studieux.

- Ambrose Bierce

lundi 19 février 2007

Double Poker

Jacques, père de Céline, joueur expérimenté.
Loris, ami de Céline, champion du tournois 2006 de l'IUT de Lyon.
Pierre, collègue musicien de Jacques, bluffeur réputé.
Nicolas, ami de Céline, québécois sans savoir.

Tous les quatre s'étaient retrouvés autour de la même table de poker, texas hold’em. Ils y avaient amenés vingt-cinq euros chacun, qu'ils joueraient jusqu'à la fin. Le gagnant emporterait cent euros.

Céline était partie se coucher, considérant ce jeu irraisonnable. L'alcool s'était mis à couler, et depuis plusieurs heures on ne comptait plus le nombre de bouteilles de vin débouchées. Des grossières erreurs commises par Loris et Pierre avaient placés le trois quart du capital de la table à la disposition de Jacques et Nicolas. La partie se jouait donc entre ces deux joueurs.

Nicolas ne buvait pas beaucoup. Il voulait toute sa concentration pour la partie. Jacques, lui, ne se retenait pas pour profiter du vin. Il avait bu beaucoup, et ça commençait à paraître.

Nicolas était focalisé sur le jeu. Deux parties de poker se déroulaient simultanément.

Une simple partie de poker est déjà complexe. Il faut déterminer, entre les bluffs, les feintes et les doubles bluffs, si son jeu est meilleur que celui des adversaires. Il faut comprendre la relation entre pouvoir et capital. Il faut pousser ses adversaires à s'entre attaquer, sans jamais se vaincre, de sorte à ce qu'aucun de ses adversaires ne s'empare de la majorité du capital. En situation de force, la maîtrise du jeu de puissance est essentielle, et une simple erreur peut réorienter la position du pouvoir sur la table. Il faut toujours rester maître de soi. Le poker est un jeu de psychologie, de patience, d'économie, de contrôle de soi, de hasard, de pouvoir et d'audace.

Plus complexe, un deuxième poker, parallèle, plus subtil, se jouait. Jacques avait beaucoup bu. Il tentait de paraître trop saoul pour bien jouer. Pour être crédible, il devait bien sûr boire réellement. Il tentait de maîtriser du mieux qu’il le pouvait l’alcool qui coulait dans ses veines. En plus, il la canalisait, il s’en servait pour faire disparaître tout son stress.

Nicolas était conscient que Jacques tentait de se faire sous-estimer. Jacques jouait plus faiblement qu’il en était capable, et Nicolas en profitait pour remporter des jeux banals et réduire, pièce par pièce, le capital de Jacques.

- Une autre coupe, mon Jack ?
- Allez, pourquoi pas ? Il est si bon ce vin.

Jacques feignait d’être encore plus saoul. Mais il l’était quand même un peu plus. Dans ce deuxième poker, Jacques cachait sa capacité réelle de jeu. Et Nicolas tentait de lire cette capacité.

Le stratégie de Jacques était simple. Il voulait se faire sous-estimer de Nicolas jusqu’à ce que Nicolas commette une erreur fatale.

Nicolas ne pouvait pas tout simplement jouer comme si Jacques n’avait pas bu. Jacques était un trop bon joueur pour Nicolas. Nicolas devait donc feindre de sous-estimer Jacques, pour que Jacques lui laisse gagner une série de jeux banals. Mais il devait rester suffisamment aux aguets pour ne pas commettre l’erreur fatale qu’attendait Jacques.

Jacques ne pouvait pas tout simplement cesser de boire et l’emporter. Pour abattre Nicolas normalement, il aurait dû s’engager dans un jeu de puissance. Mais les deux autres joueurs, qui possédaient encore ensemble un quart du capital, rendaient risqué tout jeu de puissance.

Les enjeux étaient donc entre Jacques et Nicolas, et la guerre entre ces deux joueurs prenait place à travers un poker parallèle. La maîtrise de l’alcool faisait office de cartes, et les coupes de vins remplaçaient les jetons.

- Jack, ta coupe est vide, je te sers.
- Merci. Tu ne veux pas boire Nic ?
- Boaf, tu sais, par chez nous, le vin…

Vers cinq heures du matin, le jeu décisif de la partie arriva enfin. Loris avait été élimé une heure plus tôt. Pierre possédait le cinquième du capital de la table, soit une vingtaine d’euros. Jacques et Nicolas possédaient à peu près les deux cinquièmes du capital chacun, soit une quarantaine d’euros chacun. Sur la table, il y avait le neuf de cœur, la dame de trèfle et l’as de cœur. Pierre mit all-in. Jacques suivit.

Nicolas avait dans sa main le dix de cœur et le sept de cœur. Avec la table, ça lui donnait quatre cartes en cœur, et il ne lui en fallait qu’une de plus pour avoir une couleur. Le jeu probable fort sur lequel les deux autres s’étaient lancés était la paire d’as, qui se ferait écrasé par une couleur. En misant all-in, Pierre allait débalancer le capital de la table. Si Nicolas se couchait et que Jacques l’emportait, Jacques se retrouverait avec le trois cinquième du capital, assez pour remporter un jeu de puissance. Nicolas décida donc de suivre. Il espérait voir apparaître un cœur.

- Je suis.

Loris, qui faisait le croupier depuis sa défaite, plaça sur la table la quatrième carte, nommée « the turn ». Cinq de cœur. Nicolas n’afficha aucun sourire. Intérieurement, il crut avoir gagné.

Jacques n’enchérit pas. Nicolas non plus. Soixante euros étaient sur la table, les mises additionnelles importaient peu maintenant. Le gagnant de ce jeu allait devenir le gagnant de la partie.

Loris dépose la cinquième carte, « the river ». Neuf de pique. Aucune enchère ne suivit.

Pierre dut dévoiler sa main le premier. Dame de carreaux et quatre de pique. Paire de dames, plus la paire de neuf sur la table. Double paire, moins fort qu’une couleur. Nicolas est content. Au tour de Jacques de dévoiler sa main. As de pique et as de carreau. Brelan d’as, plus la paire de neuf sur la table. Main pleine, la main au dessus de la couleur.

Nicolas dévoila tristement sa main. Cinq cartes en cœur, une bonne main, mais une main insuffisante quand même. Nicolas se retrouva avec le cinquième du capital, Jacques avec le quatre cinquième. Vingt minutes plus tard, Jacques l’emporta.

- Belle partie Jack, félicitations.
- Nicolas, ça fait des années que je n’ai pas autant apprécié une partie de poker. Merci.

Nicolas avait commis l’erreur fatale. Il avait perdu le subtil poker secondaire, et par le fait même, le poker primaire qui se jouait sur la table. Déçu, mais content de la partie, il décida d’aller se trouver un petit déjeuner.

samedi 17 février 2007

Le père de Céline

Quarante-six ans et un regard de vieux loup, Jacques amait décidemment la vie. Il savait apprécier l'argent, les femmes, l'alcool et le jeu, entre autres. C'était le genre de type qui voulait tout essayer et qui le faisait.

Jacques avait fait du marketing en Allemagne, en exportant des vins de producteurs qu'il connaissait. Barman à New York, il avait fait fureur avec son accent français. Il s'était ouvert deux restos en Angleterre, et l'un d'entre eux roulait toujours. Croupier au casino de Marseille, il avait appris à manipuler les cartes et l'argent avec le sourire, la confiance et l'attitude. A Paris, il avait joué à la bourse. Il avait gagné et perdu des sommes incroyables. Il adorait la musique et s'était payé un petite tournée de Jazz comme bassiste. Ses souvenirs les plus mémorables de cette épopée prenaient place dans les indescriptibles cafés d'Amsterdam.

Il avait roulé sur l'or toute sa vie, et il proclammait que la chance était à la portée de quiconque en voulait. Il avait aimé les femmes, beaucoup, souvent et différentes. Il connaissait le vin, le whisky, la politique et le risque. Jacques n'était pas facilement impressionnable.

A Montpellier, il s'était lié à une femme nommée Hélène, petite brunette légère, comme le sont généralement les filles du sud. Il a cru qu'elle était la femme de sa vie. Jacques et Hélène s'étaient mariés, et ils avaient eu une fille, Céline. Pour Jacques, Céline était sa fierté. Elle avait sa fougue, en plus de la beauté de sa mère.

Le mariage de Jacques avait duré quatre ans. Jacques aimait trop la vie pour n'aimer qu'une seule femme. Jacques n'avait jamais trompé Hélène; il tenait avant tout à rester un gentleman.

Divorcé, il était divisé entre les deux choses auxquelles il tenait le plus au monde, soient sa vie trépidante et sa fille. Il avait été décidé que Céline serait élevé à Montpellier. Jacques se sentait donc contraint à poser pied à Montpellier, et il s'investit à fond dans l'industrie touristique locale. Comme d'habitude, l'argent revint vite à Jacques. Il en profita donc pour voyager, et vivre, comme il l'avait toujours fait.

Dans le train, Céline parlait à Nicolas de son père. Elle ne l'appréciait pas vraiment. Pour elle, son père avait abandonné sa mère. Il était à ses yeux un égoïste qui ne s'était jamais intéressé à elle, un courreur de jupons qui ne serait jamais un père. Jacques n'avait jamais vraiment été présent pour Céline.

A Montpellier, Nicolas serra la main de Jacques.

- Bonjour, Nicolas.

Nicolas était impressionné. Jacques avait une telle façon de serrer la main, de regarder et de s'exprimer. En une poignée de main, en un échange, Nicolas sentait toute la volonté de puissance de Jacques.

Entre la force qu'émanait Jacques et le témoignage de Céline, Nicolas ne savait que penser de l'être devant lui. Il n'arrivait pas à déterminer s'il rencontrait un homme, un vrai, ou un être pitoyable.

vendredi 16 février 2007

Se lever après l'open vodka

Le soleil se leva et réveilla Nicolas. La lumère lui faisait mal aux yeux. Il avait mal à la tête. Sa gorge était sèche. Son foie réclammait du repos.

Après une douche, de l'eau et un petit déjeuner acceptable, Nicolas allait mieux. Il ne pensait plus à la blonde de la veille, Mikka ne l'accablait pas trop. C'était probablement parce que l'alcool n'envahissait plus ses pensées. Toutefois, quelque chose clochait.

Nicolas réfléchissait, et il ne savait plus comment savoir. Il avait beau chercher dans son cynisme, sa raison, il ne retrouvait plus sa chère connaissance. La France, cette inconnue, avait eu raison de son savoir.

S'endormir après l'Open Vodka

Sous l'effet de l'alcool et d'hormones, Nicolas était confus. Il ne trouvait pas sommeil. Il pensait à la blonde du bar, à Mikka, et les images tournaient dans son esprit assomé. Il faisait un pas sur la bonne voix; il ne comprenait plus trop, il ne savait plus trop. Il sécha quelques larmes puis la fatigue eut raison de ses pensées tourmentées.

Citation française

Dans la vie on n'a qu'un seul grand amour et tous ceux qui précèdent sont des amours de rodage et tous ceux qui suivent sont des amours de rattrapage.
- Frédéric Beigbeder

Open Vodka

Open Vodka. Comme dans Open Bar, mais avec de la Vodka. Un nom de fête qui promet dégénérescence, abus et déraison.

C'était le premier jour des vacances d'hiver, et l'organisation étudiante du département universitaire de Nicolas avait organisé cette fête au titre bien évocateur. Ca allait se passait dans un bar du vieux Lyon, de 22 heures à 3 heures. Dans ce pays où un verre dans un bar peut vous coûter 6 €, une infinité théorique de vodka pour 10 € était une aubaine incroyable.

Nicolas est arrivé au bar vers 22 heures trentes, et déjà la la salle était animée d'un ambiance alcolo-festive. Des jeunes, déjà pas mal réchauffés, chantaient par grands groupes de joyeuses chansons à boire issues des campagnes françaises.

C'était un bar remplit au centimètre carré près, chaud et enfummé. Au comptoir, des étudiants organisateurs découvraient les joies de la profession de barman. Dans le fond de la salle, il y avait une petite table avec une quinzaine de finissants. Céline, membre du bureau des étudiants et donc organisatrice, faisait office de serveuse pour la table.

La tendance était à la vodka diluée dans le jus de pommes ou d'orange, et Nicolas n'avait pas envie d'un composite au jus. Il se pointa au comptoir.

- Un verre de vodka straight.
- Comment?
- Vodka straight.
- ?
- ... Vodka pure.

Le jeune barman amateur lui servit un shooter de vodka. Nicolas le cala.

- Un verre, s'il-te-plait.

Le barman lui servit un verre.

- Bon. Merci!

Nicolas cherchait du regard quelqu'un qu'il connassait quand il entendit la voix de Martin surgir de derrière.

- Câolisse, un Québécois!
- All right, Martin!

En quelques minutes Nicolas se vit intégré au groupe de Martin, une bande de fêtards finis qui vivaient avec une grande réputation de buveurs. Emerveillés par le mot que venait de prononcer Martin, "câolisse", ils se mirent en tête d'apprendre à sacrer. Quelques litres de vodka plus tard, on entendait dire "tabarnak" fréquemment, un peu partout dans la salle.

Il n'était pas encore minuit et la déchéance entra au bar. Un jeune étudiant, buveur trop peu experimenté, vômit sur le sol, en passant proche d'asperger Céline. Puis il fut imité par d'autres, assez pour qu'on condomane une partie du plancher.

Un peu après minuit, l'ambiance changea. Les chansons à boire se faisant trop difficiles à executer, les jeunes se contentaient de boire carrément. Ceux qui n'en pouvaient plus rentraient déjà, le bar se fit un peu moins compact, un peu moins bruyant et un peu moins mouvementé.

Nicolas avait un quatrième verre de straight à la main et se sentait encore très bien. Il était un peu surpris de voir que des gens avaient bû, vômi et quitté aussi rapidement. Il ne sentait qu'à peine l'alcool envahir son sang et il souhaitait un peu de distraction. Son souhait s'exauça.

Une jolie fille s'assit à ses côtés. Un blonde aux yeux bruns, habillée un peu sexy.

- Alors c'est toi le Québécois.
- Ouain effectivement.
- J'adore ton accent.
- Tant mieux...

La blonde s'avérait gentille et fascinée par l'accent de Québécois. Elle avait vécu quelques mois à Montréal et elle avait adoré la ville.

Au début Nicolas la voyait comme un divertissement. Une jolie fille, le temps d'une conversation, d'un verre, de quelques sourires, sans plus. Mais elle s'avéra lui ressembler un peu plus qu'il ne le croyait. Ils parlèrent d'expériences d'écriture, de scène et de philosophie. Tous deux ne s'attendaient pas à tenir une discussion aussi élaborée dans un Open Vodka. Nicolas fut totalement sidéré quand elle lui confia qu'elle avait une haine profonde envers les attentes. Il partageait entièrement ce sentiment avec elle. Puis, elle rejoint son amie brunette sur la piste de danse.

Nicolas commençait à sentir l'alcool lui monter à la tête. Il alla rejoindre Martin, accoté sur un mur. Martin, accoté sur le mur, parce qu'il n'arrivait pas à rester debout bien longtemps autrement. La soirée approchait à sa fin, et Martin aussi. Nicolas ne voulait pas s'attacher à la Française sans attentes, et puis les gens qu'il connaissait s'en allait.

- Aller Martin, on rentre.
- Ouais bonne idée, mais y va falloir que tu me montres le chemin.
- Correct.

Nicolas et Martin retournèrent au Jussieu, à l'autre bout de la ville, à pied. Ils arrivèrent quelques minutes avant le lever du soleil, completement crevés. Open Vodka. Ils s'en souviendraient.

jeudi 15 février 2007

Convention française

Dans les fêtes dont le but est de diluer la raison, les jeunes français ne boivent pratiquement jamais de bière ni de vin. Ils s'abreuvent généralment de spiritueux.

mercredi 14 février 2007

Paprika

Ce soir-là, Nicolas était rentré tard de l'université. Il avait dû passer quelques heures sur des travaux de l'école. Il avait travaillé sous une concentration énorme et n'avait pas mangé un morceau depuis le matin. C'est donc affamé qu'il entra dans la cuisine du troisième, un peu avant vingt-deux heures.

Une fille qui semblait un peu jeune pour être universitaire préparait une sauce pour ses pâtes. C'était une sauce un peu blanchâtre, parsemée de petits points rouges.

Nicolas mit son eau sur le feu.

- Salut.
- Allo! Je m'appelle Marine.
- Nicolas.
- Enchantée.
- Qu'est-ce que tu prépares?
- Je fais à manger à mon copain, pour la Saint-Valentin. C'est une sauce au fromage. Avec du Paprika.

Nicolas et Marine discutèrent, le temps d'une cuisson de sauce. Marine était une lycéenne en terminale, passionnée de langues. Quand elle cuisinait, c'était presque toujours avec du Paprika. Elle faisait assez bien à manger, et Nicolas se sentait idiot avec son "spaggat sauce tomates".

Marine trouva Nicolas sympathique. Ayant pitié du repas de Nicolas, elle décida de lui préparer une petite sauce pour son spaghetti.

Marine cuisinait décidemment bien. Après douze heures de travail, Nicolas trouva agréable de manger ses pâtes avec un petit goût de Paprika.

lundi 12 février 2007

Ratard

Monsieur Ratard. Ratard. Celui dont on ne doit pas prononcer le nom. Au département de l'université où il enseignait, la simple sonorité de ce nom faisait trembler de peurs et de souvenirs les étudiants.

Ratard. Comme un renard, mais en plus rat.

Monsieur Ratard était le genre de professeur qui avait une autorité incontestable sur la classe. C'était un darwiniste praticien qui démolissait les étudiants faibles en employant des sarcasmes très acides. Lors de la correction des exercices, il prenait un plaisir fou à envoyer ses étudiants au tableau. Ceux-ci y écrivaient timidement leurs réponses, en attendant l'inévitable critique incisive de Ratard.

Dans un cours de maths, à un étudiant qui s'était perdu dans ses calculs :
- Non mais attend, fou pas en l'air mon exercice, t'as pas une solution qui fait du sens?

Dans un cours de maths, à un étudiant qui avait pris une démarche un peu longue pour résoudre un problème excessivement simple :
- Et "un plus un", tu peux me le résoudre en moins d'une heure?

Dans un cours d'algorithmique, à un étudiant qui multipliait les erreurs de syntaxes :
- C'est quoi ce bordel sur le tableau? T'es dyslexique ou quoi?


Contrairement à tous les autres étudiants, Nicolas aimait bien les cours de Monsieur Ratard. Ils lui rapellaient la belle époque des infâmes cours de logique de Monsieur Michaud, au Québec.

vendredi 9 février 2007

Aliénation linguistique

Agnieszka était la coéquipière idéal. Elle était sérieuse, elle savait s'amuser en travaillant et elle était première de classe.

En quelques minutes, Nicolas et Agnieszka s'adaptèrent à leurs rythmes de travail mutuels. Ils formaient un binôme très efficaces, à un détail près : Agnieszka n'était pas tout à fait à l'aise en français. En se concentrant, elle arrivait bien à écouter et parler. Mais même avec toute sa concentration, elle n'arrivait pas à saisir ce que Nicolas disait. Donc, pour se faire comprendre, Nicolas devait absoluement parler avec un accent français.

Durant toute la journée , Nicolas dut prononcer clairement ses syllabes et dire ses "a" en "A", et non en "â". Il s'y habitua assez vite, et en quelques heures il se retrouva apte à parler sans trop d'efforts le français des Français.

Et ce soir-là, en rentrant chez lui, Nicolas reconnu une sensation étrange. Il pensait avec un accent français. C'était comme quand on passe un certain temps à fonctionner dans une langue, on adapte notre pensée pour cette langue.

Nicolas essayait bien de retrouver, dans son discours intérieur, ses tournures de phrases québécoises, mais elles ne venaient pas naturellement. Il devait se concentrer pour penser comme il l'avait toujours fait, et dès que ses idées divaguaient, sa pensée québécoise.

- Putain, je pense en français de France.

Nicolas commençait à trouver la situation de plus en plus intolérable. Il avait l'impression qu'une voix autre que la sienne l'habitait maintenant, et que cet intrus manipulait ses réflexion. Il se dit que ça passerait. Mais ça empira.

Vers vingt heures, il n'en pouvait plus. Il s'assit dans son lit et décida d'écouter La Grande Messe, des Cowboys Fringants. Nicolas n'était pas un grand fan du groupe, mais dans ces circonstances, chacune des chansons de l'album lui semblait être un chef d'oeuvre musicale. Les paroles des chansons lui faisaient l'effet d'une bonne douche.

Une heure plus tard, après le dernier morceau, Nicolas était soulagé. Il se sentait propre. L'intrus était parti.

- Osti yes, chu guéri.

Agnieszka

Nicolas arriva dans son cours de projet, un cours pratique aux travaux pratiques. Nicolas estimait qu'il allait travailler seul; tous les français avec qui il avait fait connaissance avaient déjà un coéquipier régulier depuis à peu près un an.

Après avoir expliqué le quoi, quand et comment du projet, l'enseignante précisa que les travaux devaient être obligatoirement effectué en binôme (équipe de deux). Elle demanda à la classe qui était seul, et une seule main se leva : celle de Nicolas. L'enseignante s'adressa à lui.

- Tu es seul.
- Ouin.

Son expression changea. Elle avait reconnu dans le "ouin" un accent bien québécois, et elle ne voulait pas laisser seul un étudiant en échange.

- Tu es un des canadiens en échange?
- Québécois, oui.
- Tu viens d'arriver, je ne veux pas t'obliger à travailler seul. Je vais te placer en équipe avec quelqu'un.

Un français que Nicolas trouvait assez sympathique aurait bien aimé accueillir Nicolas dans son équipe.

- Ca veut dire une équipe de trois Madame?
- Non ça veut dire que l'un d'entre vous sera seul pour permettere au Canadien de s'intégrer.

La classe se tut. L'enseignante scrutait la classe en se demandant quelle équipe elle allait bien briser, et les étudiants, silencieux, se répétaient mentalement "pas moi pas moi pas moi".

Quelques secondes d'horreur pédagogique.

Coup de théatre, entra en s'excusant une grande fille blonde. L'enseignante se souvint alors :

- Ah oui, il y avait une étudiante qui n'était pas là. Bon, vous deux, puisque vous êtes seuls, vous travaillerez ensemble?

La grande fille blonde répondit avec un accent des pays de l'est.

- Oui ok.

Elle s'assit à côté de Nicolas.

- Salut, moi c'est Nicolas.
- Je m'appelle Agnieszka. Ca te dérange pas de travailler avec moi?
- Non pas du tout.

jeudi 8 février 2007

Chasse

Les nuages étaient rares et le soleil avait amorcé sa descente. La lumière orangée éclairait les toits roses des maisons de Lyon et, devant telle nature, l'instinct du chasseur vint habiter Nicolas.

Il prit en vitesse son équipement et parti à pieds dans les rues, sans planification, guidé par son instinct.

Exercice de style s'il en est un, Nicolas avait choisi de chasser avec un petit calibre. Du 28 millimètres. A l'heure où les gens finissaient de travailler, dans les étroites rues européennes, Nicolas n'eut aucune difficulté à trouver des cibles.

La première cible fût une lycéeene. Puis un jeune homme dans la vingtaine. Et un vieillard. Un chat perché sur un arbre. Et ensuite, deux femmes d'âge mûr, d'un seul coup. Un chauffeur de camion.

Il s'amusait bien mais il commeçait à trouver le travail au 28 millimètres difficile. Il passe à 70 millimètres, calibre qui assurait un précision beaucoup plus raisonnable.

Une petite fille et sa mère. Un garçon qui jouait au foot (soccer!) dans la rue. Un étudiant barbu de l'université. Et, un peu d'acharnement, Nicolas se permit un rafale sur la boulangère qui quittait son commerce.

C'est alors que Nicolas vit la cible rêvée. Une petite femme aux cheveuns bruns et long et aux yeux verts qui parlent. Elle ressemblait à Mikka. Pour ce genre de shooting Nicolas allait avoir besoin d'un maximum de précision. Il sortit l'artillerie lourde, son 300 millimètres.

Nicolas devait se concentrer. Le shooting au 300 millimètres est très difficile sans préparation, c'est un calibre tellement précis qu'il faut normalement se servir d'un trépied ou d'un point d'appuis. Alors Nicolas devait anticiper.

Nicolas observait sa proie. Il suivait sa piste fraîche, analysait ses gestes, déduisait son itinéraire. Il la sentait penser en même temps qu'il pensait lui-même, toute son attention était focalisée sur sa proie.

A quelques centaines de mètres d'un parc, il se postionna stratégiquement. Il posa son appareil sur une borne fontaine, régla la vitesse, nettoya la lentille une dernière fois. Entre deux passants en avant plan, devant la grande fontaine au centre du Parc, la jeune femme passa au centre de la mire. Une demie seconde plus tard, a l'exact bon moment, Nicolas appuya sur le déclencheur.

mardi 6 février 2007

A la manière de Basduck

L'idée est excellente. La troisième personne sera abandonnée, le temps d'imiter ce phénomène. Les fautes sont placées pour faire plus authentique.

Vous voulez savoir ce qui est drôle?

Reviens, donc, de chez Céline. (La petite bourge(oise), donc).

Michtral en fais c'est Mistral! hi hi hi

Elle m'avait appellé parce qu'elle voulait parler des poèmes de Gustave Kahn, mais je considère que c'est un con, mais elle le sait, mais elle pense aussi que c'est un con, mais on le sait qu'on le sait tous les deux. Ce qui veut dire que c'était pas pour les poèmes.

Elle me voulait pour mon corp, donc!

Reviens de chez Céline, donc.

DAVIEL NE POST PLUS!

Et oui, et il ne dit plus rien, il n'est plus là, ça fait un mois qu'il est parti, le petit garçon a finalement compris. D'ailleurs, Matthieu Simard s'est poussé aussi, alors je sens que je vais m'ennuyer, plus personne sur qui basher, snif, snif. (Snif)

Reviens de chez Céline, donc.

sommes allé manger de la crème glacée, en plein janvier. C'était tout froid et on gelait tout les deux, alors elle avait besoin de chaleur et moi aussi, et donc, avec un sac de pommes en main, woops....

Qui meurt paie ses dettes
- Shakespeare
KAkfadan tu dois toujours tes cinqs vérités, donc, (et par opposition au romantisme), [...]
En fait Kafkadan est peureux et sous l'emprise de Nadia, et étant donné le sac de pomme, ben...
Tout ça pour dire, donc, que, et Mistral sera pas d'accord, que, donc, le théatre post-modernisme Canadien fait classique, à sa façon, et c'est tellement normal parce que c'est écrit par des zauteurs du plateau.
Bon, m'en retourne chez Céline, donc.

lundi 5 février 2007

Jean-Marc

Lundi matin, dans les escalier, Nicolas entendit un accent québécois, qui n'était pas la voix de Martin. On lui avait dit qu'il y avait un autre étudiant québécois dans le bloc F, mais il ne l'avait jamais rencontré.

Nicolas grimpa d'un étage. En monta, il croisa un autre résident du bloc, peut-être le québécois en question. Il était coutume de se dire froidement bonjour en se croisant dans le bloc F, et Nicolas en profita donc pour le tester.

- Bonjour.
- Ah ha, c'est un accent du Québec ça!

Les deux québécois sourirent à l'idée de trouver un comparse national. Ils s'échangèrent leurs numéros de chambre avant de partir pour leurs destinations respectives.

Le soir même, Nicolas alla cogner à la porte de Jean-Marc. Jean-Marc offrit du rhum à Nicolas, ce qu'il accepta volontier.

Jean-Marc était en France en terre connue. Il avait étudié deux ans dans la région de Paris, et sa soeur habitait à quelques kilomètres de Lyon. Pour lui, l'échange en France était la chance de revoir des personnes à qui il n'avait pas parlé depuis des années. Depuis qu'il était arrivé, il était aller retrouver deux anciens amis. Pour Jean-Marc, la France était une terre joyeuse de retrouvailles et de festivité, et ça se sentait.

Assis sur le lit de Jean-Marc, ce soir-là, Nicolas but plus les paroles de Jean-Marc au'il ne but son rhum. Vers minuit, après une soirée à écouter de captivantes histoires, Nicolas se mis au lit. Et avant de s'endormir, il songea à l'Europe, ce monde dont il ne savait encore que si peu.

samedi 3 février 2007

Menace

A cette heure-là, les Tramway de la ligne T1 étaient totalement déserts. Nicolas, en mangeant un carotte, était dans un des Tramway de la ligne et attendait patiemment son arrêt.

Un jeune dans la vingtaine, habillé en rapeur, entra sans billet dans le tramway. Il s'assit à une mètre de Nicolas et rangea son i-pod dans son manteau.

"Habillé comme il est, ou bien son i-pod est volé, ou bien je juge trop rapidement", se dit Nicolas. Alors le jeune s'adresse à Nicolas.

- Hé, je peux te demander un service.

Le jeune en question parlait à la façon des jeunes français de la rue, et Nicolas avait peine à comprendre ce qu'il disait.

- Parle plus lentement s'il-te-plait, je comprends pas.

Il répéta plus lentement.

- Tu peux me rendre un service?

Nicolas comprit, et il savait très bien ce que ça signifiait.

- Je ne penserais pas non.
- Hé attends, j'te parle comme ça et tu refuses de m'aider?
- ...
- T'as un accent toi, tu sors d'où?
- Du Québec.
- C'est où ça?
- Au Canada.
- Oh. Alors tu ne parles par Français.
- Oui. Au Québec on parle Français.
- Ecoute mec, je suis dans la galère et...

Voyant que le jeune au i-pod allait quêter, Nicolas préfera faire comme s'il ne comprenait pas.

- Désolé, je comprends pas ce que tu dis.
- Je dis que c'est la galère.
- Hein?
- C'est la merde. Tu comprends ça?
- Ouain...
- J'ai pas de quoi manger, et je sais pas, si tu pouvais me...
- Je suis pas intéressé.
- Tu peux pas me faire ça, je ne mangerai pas ce soir et...

Nicolas réalisa. Il lui restait des carottes.

- Eille j'ai un flash! Il me reste de carottes dans mon sac, et j'ai pu vraiment faim.
- Ah non.
- Comment ça "ah non"?
- Les carottes c'est pour les lapins.
- Ben moi j'en mange.

Le quêteur changea d'attitude. Il se leva et alla se placer debout devant Nicolas.

- Ecoute, sois sympa OK? Ici c'est pas le Canada, tu crois que je ne suis pas capable de te flinguer en sortant du Tram? Tu crois que ça m'amuse que tu me proposes des carottes.

Le coeur de Nicolas se mit à battre deux fois plus vite. Il feigna ne pas comprendre la phrase, et en profita pour jeter rapidement un coup d'oeil aux mains et aux poches du type au i-pod volé.

- S'cuse-moi, mais je comprends pas un mot de c'que tu me dis.

Ses poches et mains semblaient vides. Mais Nicolas n'était pas plus calme pour autant.

- Tu comprends pas ce que je te dis? Fous-toi pas de ma gueule. Je vais te tirer si tu te fous de ma gueule, tu comprends ça?

Nicolas ne répondit pas, et se mit à fixer le mur en simulant l'indifférence, tout en essayant de camoufler sa respiration de plus en plus rapide.

- Ici c'est la France, et si c'est la galère pour moi ça l'est pour toi aussi.

En terminant sa phrase, le jeune lança sa main vers le porte feuille de Nicolas, qui sortait un peu de sa poche. D'un geste brusque, Nicolas arrêta net le mouvement du voleur. Puis, très sérieusement, il planta dans ses yeux dans les siens, et lui dit :

- Décâlisse.

Le français déguerpit en bafouillant une insulte. Dès qu'il fut partit, Nicolas reprit son souffle.

Retour à Lyon

Nicolas rentra à la gare de Paris, mangea ses sandwich avec des carottes. Il prit le train et arriva vers vingt-deux heures à Lyon.

En sortant de la gare, et en voyant les annonces lumineuses du centre commercial de la Part-Dieu, Nicolas ressentit quelque chose qu'il n'avait pas prévu. Voyant qu'il était revenu à Lyon, il se sentit chez lui.

Quy

Née de parents vietnamiens immigrés en France, Quy était plus française que vietnamienne. Elle était passionnée de lettres et elle avait une plume hors du commun. Dû à ses origines, sa personnalité et sa sélectivité, elle n'avait pas beaucoup d'amis. Et de vrais amis, elle n'en comptait aucun.

Quy était déchiré entre deux facettes d'elle-même. L'une, l'artiste créative, joyeuse de réinventer le monde par son imaginaire, se manifestait par une excitation sincère face à la vie. L'autre, la petite fille seule et triste, désabusée face à l'ennui du quotidien, s'exprimait par une écriture mélancolique.

En ces points, Quy était identique à Nicolas. Car Nicolas aussi était généralement positif et maniait en secret une plume sombre.

C'est par l'écriture que Quy et Nicolas ont pris conscience de leurs existances mutuelles. Un peu par hasard, Quy avait découvert le carnet de toile Nicolas. Elle lui avait écrit, et, charmé par la plume de Quy, Nicolas lui répondit. C'est ainsi qu'ils commencèrent une longue correspondance.

Après des mois de lettres littéraires, de lettres philosophiques, de lettres d'idées et d'anecdotes, Nicolas et Quy étaient censés se rencontrer dans une station de métro de Paris.

L'après-midi fut merveilleux. Ils se rendirent à une exposition de photographie. Ils discutèrent et commentèrent, tels de vieux amis. Quy fût amusée de voir Nicolas sortir un sac de carottes quand il eût un faim, et Nicolas apprit de Quy de nombreuses expressions françaises.

Nicolas et Quy surent que l'amitié qu'ils partageaient en lettres s'était étendu à la vie concrète. Au coucher du soleil, souriants, il se dirent tous deux à la prochaine.

Caroline

Jolie étudiante en droit, Caroline était venue en France pour venir voir des ses yeux cette vieille Europe, dont elle avait tant rêvé. Depuis qu'elle avait fuit l'épouvantable cocon familial de Gatineau pour aller étudier à Montréal, puis à Québec, elle voyageait dès qu'elle le pouvait. Elle avait passé trois semaines en Chine entre deux sessions de Cégep, puis un mois au Sénégal avec une amie, et maintenant elle était à Paris pour cinq mois. Bien qu'elle était jolie et intelligente, ses relations amoureuses ne duraient jamais longtemps; aucun homme n'arrivait à comprendre tout ce qui s'agitait dans la tête de cette fille qui fuyant constemment ce qu'elle avait.

Pour Caroline, arriver à Paris, c'était comme avoir sa piqûre pour un junkee. Ce n'était pas bon, ce n'était pas exaltant, c'était nécessaire. Elle prenait sa dose d'inconnu, et, pendant qu'elle le faisait, elle n'avait pas à penser à ce qu'il l'avait amené à le faire.

Droguée des voyages, Caroline, malheureuse mais souriante, attendait Nicolas dans une gare Parisienne.

Un peu plus d'une semaine plus tôt, en arrivant à Paris, Caroline et Nicolas s'étaient parlé quelques minutes. Pour Caroline, rencontrer Nicolas avait été une expérience. Nicolas la changeait, il la repaysait. Avec Nicolas, Caroline se sentait chez elle, un sentiment qu'elle ne comprenait pas encore, qui la bouleversait, mais qu'elle appréciait. Elle apprit que Nicolas partait à Lyon et, déçue, elle lui dit de l'avertir s'il passait par Paris. Ce qu'il fit.

Nicolas rejoint donc Caroline, et ensemble ils partirent pour le cimetière du Père Lachaise. Nicolas avait un plan très simple : prendre des photographies du légendaire cimetière tout en discutant avec une jolie étudiante en droit.

Les deux étudiants discutèrent donc. Ils parlèrent de la France, de politique, de voyages, des études et du Québec. Caroline se sentait bien, sans trop comprendre ce qui se passait. Elle se demanda si elle n'était pas amoureuse, mais quelque chose au fond d'elle lui indiquait que ce n'était pas ça, que ce qu'elle sentait était tout autre. Caroline était un peu confuse, mais heureuse.

Et alors Nicolas parla de chez lui.

Sans trop comprendre pourquoi, Caroline se sentit mal. Elle voulut crier.

Elle ne comprenait plus rien, à cause du voyage, à cause de Nicolas, à cause d'un drôle de sentiment qu'elle avait avec lui, et surtout à cause de toutes ces années à fuir un vide qui ne cessait de revenir. Elle voulut crier, ne plus avoir peur de l'inconfort et se découvrir un chez elle qui ne serait pas Nicolas, un chez elle qui ne serait pas attaché à la présence de ce garçon qu'elle ne connaissait qu'à peine. Elle avait mal et ne comprenait pas. Elle voulut crier, mais elle n'en fit rien. Malaisée, elle ne dit rien et laissa peser un très lours silence.

Nicolas sentit ce silence, sentit que Caroline nétait pas à l'aise, mais ne savait pas comment réagir. Il continua la conversation, doucement, et Caroline s'y réintégra, doucement.

A la fin de l'avant-midi, Nicolas dû partir, parce qu'il avait un rendez-vous avec quelqu'un d'autre en après-midi. Nicolas et Caroline se dirent au revoir.

Dans le métro, en direction de sa prochaine destination, Nicolas songea au silence, à ce qu'il avait perçu de Caroline au cimetière du Père Lachaise. Il se demanda ce qu'il aurait pu faire, sans trop être capable de savoir. Il ressentit un malaise qui lui fit penser à son histoire avec Gabrielle, et il réfléchit à tout ça pendant le reste de son trajet.

Dès que Nicolas quitta son champ de vision, Caroline sentit l'habituel vide revenir. Incapable de le surmonter, elle décida d'aller visiter l'arc de triomphe. Elle pensa un peu moins au vide, et se sentit un peu moins mal.

Cinq heures et demi

Nicolas se leva vers cinq heures du matin, ce qu'il n'avait pas fait depuis des années. Il prit une douche et se prépara un sandwich, qu'il mit dans un sac ziploc. Il ouvrit son sac à dos et y mis son appareil photo, deux lentilles, son flash, quatre films couleur et deux films noir et blanc. Il ajouta le sandwich, et, pour les éventuels petits creux, un sac de carottes.

Il prit le tramway jusqu'à la gare Lyon Part-Dieu. Il embarqua dans un TGV. Quelques minutes plus tard, au départ du train, Nicolas s'endormit. Deux heures plus tard, il se réveilla, à Paris.

vendredi 2 février 2007

Curriculum Vitae

Ce matin-là, Nicolas entra dans son cours d'expression avancé, en ayant aucune idée de ce qui pouvait bien se passer dans un cours qui portait ce nom. Il se choisit une place au hasard. Une minute plus tard, Céline vint s'assoir à ses côtés. En attendant le professeur, Nicolas décrit à Céline l'hiver québécois et elle, en retour, lui raconta la chaleur de la ville d'où elle venait, Montpellier, au sud de la France.

Le cours d'expression portait sur le stage et Nicolas constata qu'il ne connaissait rien aux méthodologies françaises. Il prit des notes, qu'il n'était pas certain de comprendre, à propos du rapport de stage de cinquante page qu'il allait devoir produire et comprit que son CV était plus américain que français.

Après le cours, Céline donna un coup de main à Nicolas pour adapter son CV aux normes françaises. Elle lui donna quelques conseils et puis partit, parce qu'elle devait prendre le train pour aller passer la fin de semaine à Montpellier.

jeudi 1 février 2007

Convention française

Dans un lieu public, les itinérants qui quêtent abordent les passants en leurs demandant un service. En plus, généralement, ils sont pickpocket.